L’entrepreneuriat peut-il changer le monde?
« Notre pouvoir ne réside pas dans notre capacité à refaire le monde, mais dans notre habileté à nous recréer nous-mêmes. » – Mahatma Gandhi
Les entrepreneurs sont-ils les nouveaux messies de notre époque ?
Avant de répondre à cette question, il est nécessaire den clarifier la sémantique. Quest-ce que lentrepreneuriat? Cantillon, précurseur de la théorie de lentrepreneuriat, affirme déjà en 1755 que lentrepreneur est un acteur important qui influence le marché économique. Quant à lui, Schumpeter définit, en 1911, lentrepreneur comme étant une personne qui innove et crée de nouvelles combinaisons, de nouveaux produits ou de nouveaux processus. Aujourdhui, tant les chercheurs que les économistes considèrent lactivité entrepreneuriale comme étant essentielle à la vigueur économique.
Mais que veut-on dire par « changer le monde »?
Il semble donc clair que lentrepreneuriat, dans la mesure où lentrepreneur adopte une approche innovante et créative, aurait un impact important au sein des sociétés mondiales, et ce, à la fois sur les plans économique et social. Ceci nous amène à une autre question : quentend-on par « changer le monde »? Pour certains, ce changement se traduit par un impact économique alors que pour dautres, il sous-entend un impact social. Cependant, pour plusieurs, il se manifesterait plutôt par un impact socio économique, doù les termes en émergence « entrepreneuriat du changement » ou « entrepreneuriat social ».
Les indicateurs de performance, de lun ou de lautre, sont toutefois différents : ils ne sont pas nécessairement opposés, mais plus souvent complémentaires et ils sinfluencent entre eux. Dun côté, on parle dindices économiques tels que le PIB, le nombre demplois ou la productivité. De lautre, on parle plutôt du taux de participation à la collectivité, de lintégration sociale des personnes ayant un handicap ou encore du développement de services particuliers pour une catégorie de personne exclue des circuits classiques du monde du travail. Cette deuxième vision de lentrepreneuriat s’intégrerait alors à la « réinvention de léconomie » vers une société qui priorise la biodiversité entrepreneuriale.
Est-ce vraiment une réinvention?
La récente génération dentrepreneurs, jeunes et moins jeunes, issue dune nouvelle démocratisation du travail est plus scolarisée, ambitieuse, connectée et tournée vers linternational. Les frontières ne sont pas un obstacle à la croissance. Une récente étude, réalisée par HSBC Private Bank en 2016 auprès de huit économies prééminentes dans le monde, démontre que la génération Y crée des entreprises plus paritaires (hommes-femmes), dynamiques et rentables, et quelle en lance beaucoup plus que la précédente. Au-delà dindicateurs économiques élogieux, cette nouvelle tendance entrepreneuriale se démarque également par une vision inclusive des activités dans la société. Les Y ont le désir davoir un impact significatif sur leur communauté : ils sont beaucoup plus impliqués dans des initiatives philanthropiques et ont à cur lenvironnement. Alors que la génération des baby-boomers avait pour objectifs de mettre en place des structures, la nouvelle génération cherche à briser les structures, les paradigmes, les hiérarchies et les façons de faire. Lentreprise par excellence en serait une qui, en regard de cette réinvention, serait un facteur clef du développement et de lessor dune société.
Est-ce meilleur?
Le nouvel entrepreneur, en tant quindividu, semble plus outillé que son prédécesseur. Un regard sur lhistoire économique de lentrepreneuriat démontre que celui-ci a toujours eu un impact sur les sociétés : il a contribué au succès du libre marché, de la démocratie, de la croissance de la richesse générale et de la diffusion du bien-être. Aujourdhui, nous notons une différence significative quant aux possibles interconnectivités entre les cultures, entre les pays et entre les individus, quelles que soient leurs origines. Par conséquent, limpact de lentrepreneuriat contemporain élargi les frontières, voire les rends « désuètes ». Nous navons quà penser aux enjeux actuels de la mondialisation, où lon sent un écart significatif entre la vision des jeunes entrepreneurs et celle de la génération des baby-boomers. Les nouvelles entreprises qui vivent dans le « nuage », telles UBER, airbnb et plusieurs autres nayant pas de frontières, vivent une croissance vertigineuse, changent les marchés boursiers mais, plus encore, transforment les façons de faire. Est-ce meilleur? Là nest pas la question. Chaque génération, à sa façon, a transformé le monde et la nouvelle ne fera pas exception. Cest en repensant ses façons de faire que lentrepreneuriat peut changer le monde.
Source: Gestion HEC Montréal
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